La sécurité routière reste un enjeu national et la traque aux contrevenants continue, par des appareils automatisés, des contrôles mobiles ou par la vidéoverbalisation qui se développe surtout en zones urbaines. Quels sont donc les recours pour les conducteurs ?
Des p.v. relevés par des appareils automatisés
En pratique, le plus grand nombre de procès-verbaux de contravention en matière routière est issu des contrôles automatisés avec 26,1 millions de p.v. dressés en 2017. Pour ces infractions, les avis de contravention sont adressés au propriétaire du véhicule. Les locataires les reçoivent aussi systématiquement à la suite de la désignation par les loueurs de véhicules.
Dans le cadre du système de l’amende forfaitaire, pour les contraventions des quatre premières classes, lorsque le propriétaire reçoit l’avis de contravention et qu’il a un doute, il est en droit de demander au centre de contrôle automatisé des infractions situé à Rennes l’envoi des photographies relatives à l’avis en cause, par lettre accompagnée d’une photocopie d’une pièce d’identité, du certificat d’immatriculation du véhicule et de l’avis reçu. Cette démarche n’étant pas suspensive : elle n’interrompt donc pas le délai de 45 jours à compter de la date d’envoi de l’avis pour contester l’infraction.
S’il existe un motif sérieux pour contester l’infraction ou lorsque l’examen des photographies prises par l’appareil automatisé ne permet pas d’identifier clairement et sans équivoque le conducteur au moment des faits, le propriétaire ou le locataire qui reçoit l’avis a la possibilité de contester être l’auteur de l’infraction par une « requête en exonération » en envoyant une lettre recommandée avec A.R., dans les 45 jours de la date d’émission de l’avis, au centre de contrôle automatisé avec le formulaire de requête en exonération daté et signé en joignant l’exemplaire original de l’avis, en application de l’article 529-10 du Code de procédure pénale.
Au stade de l’amende forfaitaire majorée (AFM), la contestation se nomme « réclamation » et doit être adressée en principe dans le délai de trois mois à compter de l’émission de l’avis d’amende forfaitaire majorée selon l’article 530 du Code de procédure pénale. Ces contestations doivent être argumentées en fait et en droit en rappelant les textes applicables et la jurisprudence afin d’avoir des chances sérieuses de succès.
Rappelons qu’en matière de contravention, une personne physique qui est titulaire du certificat d’immatriculation d’un véhicule n’a aucune obligation de désigner la personne qui était le conducteur du véhicule au moment des faits.
En revanche, pour les personnes morales propriétaires ou locataires d’un véhicule, telles que les sociétés commerciales ou les associations, une obligation spécifique de désignation de l’auteur des faits par le représentant légal de la personne morale a été introduite en 2017 et est visée à l’article L. 121-6 du Code de la route.
Dans sa requête en exonération, le propriétaire ou le locataire du véhicule est en droit de contester être personnellement l’auteur de l’infraction. En effet, il revient au ministère public, qui a la charge de la preuve, de prouver qui était le conducteur du véhicule pour engager sa responsabilité pénale personnelle.
En contestant une infraction relevée par un appareil de contrôle automatisé, le propriétaire doit verser une consignation du montant de l’amende forfaitaire, sorte de montant de garantie qui sera remboursé en cas de relaxe, ou viendra en déduction d’une éventuelle amende civile au titre de la responsabilité pécuniaire du titulaire du certificat d’immatriculation ou du locataire.
Lorsque le ministère public ne peut pas prouver que le titulaire du certificat d’immatriculation ou le locataire était effectivement le conducteur du véhicule au moment des faits, notamment lorsque les photographies relatives à l’infraction sont trop sombres, floues ou prises par l’arrière du véhicule, ne permettant ainsi pas d’identifier clairement et sans équivoque le conducteur, les chances de relaxe au plan pénal sont élevées, conformément à la jurisprudence constante.
Une telle relaxe pénale a pour effet d’écarter tout retrait de points et toute inscription de l’infraction au Casier judiciaire. Toutefois, même en cas de relaxe pénale, le juge a la possibilité de prononcer à l’encontre du propriétaire ou du locataire du véhicule une amende civile au titre de la responsabilité pécuniaire visée à l’article L. 121-3 du Code de la route qui n’entraîne aucun retrait de points ni inscription de l’infraction au Casier judiciaire.
Toutefois, si le propriétaire du véhicule peut établir, par tous moyens de preuve, qu’il était ailleurs au moment des faits, par exemple en produisant des billets d’avions ou de train nominatifs, la relaxe totale s’impose avec remboursement de la consignation versée, sans responsabilité pécuniaire.
Les p.v. relevés par vidéoverbalisation peuvent être contestés
En ville, la vidéo-verbalisation est devenue un instrument efficace pour dresser des procès-verbaux à distance. Dans la capitale, près de 1.200 caméras vidéo contrôlent les faits et gestes des usagers. Un agent situé dans une salle de contrôle surveille les écrans projetant les images des caméras vidéo et dresse des p.v. sur un écran dédié. Les informations sont ensuite adressées au centre de contrôle de Rennes qui émet les avis adressés au titulaire du certificat d’immatriculation du véhicule concerné dont le nom et les coordonnées figurent sur le système des immatriculations (SIV).
Un décret n° 2018-795 du 17 septembre 2018, modifiant notamment les articles R. 130-11 et R. 121-6 du Code de la route, a allongé la liste des contraventions pouvant faire l’objet d’un p.v. établi par un agent à distance et pouvant par ailleurs engager la responsabilité pécuniaire du propriétaire du véhicule ou du locataire. Nombre de p.v. ont déjà été émis pour circulation dans les voies de bus ou sur les pistes cyclables, pour non-respect des feux rouge, refus de priorité à un piéton ou circulation en sens interdit.
Pour ce type de contraventions, le propriétaire ou locataire du véhicule est parfois surpris de recevoir à son domicile un avis qui indique que le contrevenant a fait l’objet d’un « contrôle », sans mentionner expressément que le contrôle résulte de la vidéoverbalisation.
En l’absence d’interception et donc d’identification formelle du conducteur, le propriétaire ou le locataire du véhicule qui reçoit à son domicile un avis de contravention généré par la vidéo-verbalisation est en droit de contester l’infraction par une requête en exonération recevable dans les 45 jours de la date d’émission de l’avis. Il peut contester être personnellement l’auteur des faits et aussi tous autres moyens utiles. Dans ce cas de figure, le propriétaire ou le locataire qui conteste la contravention n’a pas à verser de consignation préalable.
Sauf à prouver par tous moyens qu’il n’est pas l’auteur des faits, il s’expose généralement à une amende civile au titre de sa responsabilité pécuniaire sans retrait de points, comme c’est déjà le cas pour les excès de vitesse ou pour le non-respect des feux rouges fixes relevés par des appareils automatisés.
Dans le cas d’une contravention relevée avec interception du conducteur pour divers types d’infractions, la requête en exonération doit aussi être déposée dans les 45 jours de la date d’émission de l’avis et devra indiquer, au cas par cas, en quoi le procès-verbal était le cas échéant irrégulier ou l’infraction non constituée, par exemple, un p.v. de contravention pour excès de vitesse qui ne mentionne pas le lieu précis de l’infraction est dénué de force probante du fait de cette imprécision.
Par Me Grégoire Marchac
Avocat à la Cour de Paris
Administrateur de l’Association des Avocats de l’Automobile.