C’est légitime de souhaiter personnaliser son véhicule, qu’il soit moderne ou ancien. Mais cela ne doit pas entraîner des « transformations notables ». Pour le marché des véhicules anciens, acquérir un véhicule de collection transformé peut entraîner bien des difficultés pour l’acquéreur notamment s’il sollicite auprès de la Fédération Française des Véhicules d’Epoque (FFVE), pour le faire immatriculer en certificat d’immatriculation de collection une attestation de datation et de caractéristiques, qui ne peut être délivrée qu’à des véhicules « en état d’origine ».

Il est toujours tentant pour un particulier, voire pour un professionnel, d’améliorer une voiture de collection, surtout lorsque de nombreuses pièces mécaniques, parfois rassemblées en kits, sont disponibles ou qu’il est aisé mécaniquement de greffer des éléments de versions ultérieures.

Lors de l’achat, la prudence s’impose donc avant d’acquérir un véhicule qui vous semble modifié déjà visuellement. S’il s’agit d’une simple personnalisation limitée, un simple « tuning » avec des modifications mineures, telles que des boucliers, bas de caisse, petits accessoires, décorations adhésives, volant ou sièges, cela ne pose pas de difficulté, sauf si, par exemple, des sièges sont ajoutés car le nombre de places, qui figure sur le certificat d’immatriculation, est donc augmenté.   Il en va autrement si le véhicule a subi des « transformations notables » au sens de l’article R. 321-16 du Code de la Route qui prévoit que : « Tout véhicule isolé ou élément de véhicule ayant subi des transformations notables est obligatoirement soumis à une nouvelle réception. Le propriétaire du véhicule ou de l’élément de véhicule doit demander cette nouvelle réception au préfet. Le ministre chargé des transports définit par arrêté les transformations notables rendant nécessaires une nouvelle réception. ».

Quelle limite entre amélioration et transformations notables ?

L’Administration explique clairement les limite qu’elle pose entre « personnalisation d’un véhicule par des modifications mineures » et « transformations notables » dans une circulaire du 19 juillet 1974 : constituent des transformations notables les modifications affectant les mentions indiquées sur le certificat d’immatriculation, encore appelée en pratique  « carte grise », et les indications contenues dans la notice descriptive du véhicule établie par le constructeur (document que l’on appelait autrefois la « fiche des Mines »), un document malheureusement difficile ou impossible à obtenir pour certains véhicules anciens. C’est à dire, en particulier, tout ce qui concerne la constitution du châssis, la carrosserie, la suspension, le nombre d’essieux, l’empattement, les voies et porte-à-faux avant et arrière, le poids et les charges par essieux, le moteur, la transmission du mouvement, la direction (volant non compris) et les freins. Vous le voyez, le champ des éléments du véhicules non modifiables est volontairement large.

Parmi les indications figurant sur le certificat d’immatriculation, il est évident que la puissance du véhicule et le type de carrosserie sont des données ne pouvant être modifiées.

transformer en cabriolet, un exercice tentant si le cabriolet a une cote bien supérieure. D’une manière générale, au-delà du simple « tuning », en réalité peu de modifications importantes peuvent donc être effectuées sur un véhicule destiné à circuler sur la voie publique. Et dans le cas où celles-ci touchent les éléments énoncés ci-dessus, le véhicule ne doit pas circuler sur la voie publique. Sauf si son propriétaire s’oblige à entamer (et réussir) un processus de « réception à titre isolé ». Réception à titre isolé, de quoi parle-t-on?

La Réception à Titre Isolé (RTI)

Une « réception à titre isolé » (la « RTI ») est un processus qui va conduire l’Administration à examiner les modifications effectuées sur le véhicule puis, éventuellement après quelques aménagements, si elles sont validées, à délivrer un certificat de conformité qui permet ensuite l’obtention d’un nouveau certificat d’immatriculation. En effet, lorsqu’un véhicule est homologué, il répond à certaines caractéristiques et normes notamment en termes de sécurité. Lorsque les caractéristiques du véhicule sont notablement modifiées et qu’il n’est donc plus conforme à son homologation, son propriétaire est tenu de déclarer de telles transformations en préfecture dans le délai d’un mois de la modification. Il doit alors effectuer cette démarche de « réception à titre isolé » du véhicule auprès de la Dreal (« Direction régionale de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement », ou de la Drieat (« Direction régionale et interdépartementale de l’Environnement, de l’Aménagement et des Transports) pour l’Ile-de-France.

La démarche peut se révéler délicate et fastidieuse pour un particulier si le véhicule a fait l’objet de nombreuses modifications. Dans la pratique, il est conseillé de se faire assister par un professionnel de la vente de véhicules d’occasion. Elle nécessite en effet de produire des documents techniques, de répondre aux questions de la DREAL qui fait subir des tests au véhicule et de procéder aux aménagements réclamés par celle-ci en particulier au regard de la sécurité. Il faut être conscient que, parfois, des véhicules trop modifiés ne pourront pas obtenir de réception à titre isolé. Quand c’est le cas ou quand la démarche n’a pas été effectuée, le propriétaire du véhicule s’expose à des difficultés s’il circule avec celui-ci sur la voie publique.

Des risque au pénal et au civil

Au plan pénal, le propriétaire d’un véhicule qui ne déclare pas les transformations notables en Préfecture dans le délai d’un mois de la modification peut être théoriquement poursuivi, même si c’est rare en pratique. Le fait de mettre ou de maintenir en circulation un véhicule notablement transformé constitue une contravention de la 4e classe punie au maximum d’une amende de 750 €. Le fait de le vendre ou de le mettre en vente constitue une contravention de la 5e classe punie au maximum de 1500 € ou de 3000 € en cas de récidive (art. R. 321-4 du Code de la route). Le préfet peut aussi prescrire l’immobilisation du véhicule transformé et sa mise en fourrière.

Au plan civil, les transformations notables ont plusieurs conséquences juridiques. Elles ont un effet sur le contrat d’assurance automobile, puisqu’elles modifient l’évaluation du risque par l’assureur, le calcul de la prime d’assurance étant effectué sur la base des déclarations de l’assuré. Celui-ci est donc tenu d’informer l’assureur à la souscription et pendant la durée du contrat du fait que le véhicule assuré a fait l’objet de transformations notables, par exemple en lui fournissant une expertise du véhicule décrivant les modifications. A défaut, en cas d’accident, cela peut entraîner, selon les cas, une réduction de l’indemnisation ou la nullité du contrat d’assurance, l’assureur gardant les primes payées. L’article L. 113-8 du Code des assurances prévoit ainsi que « le contrat d’assurance est nul en cas de réticence ou de fausse déclaration intentionnelle de la part de l’assuré, quand cette réticence ou cette fausse déclaration change l’objet du risque ou en diminue l’opinion pour l’assureur, alors même que le risque omis ou dénaturé par l’assuré a été sans influence sur le sinistre. Les primes payées demeurent alors acquises à l’assureur, qui a droit au paiement de toutes les primes échues à titre de dommages et intérêts. »

En matière civile, la revente d’un véhicule de collection ayant subi des modifications notables peut également s’avérer problématique, surtout si l’acquéreur n’en a pas été préalablement informé. Il est ainsi conseillé au vendeur de conserver une preuve écrite établissant que l’acheteur a bien été informé de celles-ci, et qu’il acquiert donc le véhicule en toute connaissance de cause.

Les transformations notables affectant un véhicule peuvent, si l’acquéreur n’en a pas été dûment informé avant la vente, permettre de la faire annuler sur les fondements de l’erreur sur les qualités essentielles, du dol ou d’obtenir la résolution de la vente pour défaut de délivrance d’une chose conforme. Régulièrement, les tribunaux prononcent la résolution de la vente d’un véhicule non conforme ou qui été modifié, par exemple lorsque le moteur monté dessus ne correspond pas au moteur d’origine et est plus puissant, ou bien simplement comme dans un arrêt de la 1ère Chambre Civile de la Cour de cassation du 17 octobre 2018 lorsque « les quatre pneus, jantes et ressorts de suspension du véhicule n’étaient pas conformes aux indications du constructeur ». Les tribunaux sont d’autant plus sévères en cas de transformation notable lorsque le vendeur cède le véhicule en déclarant et garantissant expressément dans le certificat de cession que le véhicule n’a subi aucune transformation notable.