La pratique de l'expertise judiciaire automobile

LA PRATIQUE DE L’EXPERTISE JUDICIAIRE AUTOMOBILE

Après l’acquisition d’un véhicule automobile, l’acheteur peut se rendre compte plus ou moins rapidement de certains défauts ou de non-conformités. A l’occasion de travaux d’entretien périodique ou de réparations de son véhicule confiés à un garagiste, son propriétaire peut constater des défauts, des pannes ou des dysfonctionnements. Que faire alors ? De tels défauts pou non-conformités nécessitent d’être prouvés pour faire valoir ensuite ses droits. En pratique, pour dépasser le simple ressenti, une réaction émotionnelle et les dénégations des parties, cela nécessite le plus souvent de faire appel à un sachant extérieur au litige et indépendant, l’expert judiciaire. Comment mettre en place une expertise judiciaire et comment se déroule-t-elle ?

Quand un acheteur est mécontent du véhicule neuf ou d’occasion qu’il vient d’acquérir, parfois lorsqu’il tombe en panne peu après la vente, voire le jour-même de la vente, il a tendance à adresser une réclamation au vendeur sur la base de ses propres constatations et impressions, en joignant par exemple des photographies ou un nouveau procès-verbal de contrôle technique indiquant de nombreux défauts. Cette première réaction est utile mais un accord ultérieur entre les parties nécessite souvent l’avis d’un tiers expert qui pourra émettre un avis éclairé sur les défauts ou non-conformités du véhicule. La mise en place d’une expertise amiable en dehors de toute action judiciaire est possible, mais elle n’aboutit pas toujours à un accord amiable et rapide des parties. De plus, les tribunaux ont tendance à exiger un rapport d’expertise judiciaire établi par un expert indépendant des parties pour pouvoir trancher un contentieux au fond.

 

Quel est le rôle d’une expertise judiciaire ?

Face à des défauts avérés du véhicule ou des non-conformités, parfois des vices mécaniques graves, la solution pratique pour la partie qui s’estime lésée consiste à mettre en place une expertise judiciaire en saisissant le Juge des référés avant tout procès au fond, par exemple dans l’optique d’obtenir la résolution judiciaire de la vente ou bien pour obtenir la condamnation du garagiste dont la faute est établie par l’expertise à des dommages et intérêts lorsque des réparations n’ont pas été effectuées conformément aux règles de l’art et aux préconisations du constructeur.

Parfois, lorsque le rapport d’expertise judiciaire est déposé au Tribunal, les avocats des parties peuvent se concerter et convenir d’un accord transactionnel afin de clôturer le litige rapidement et d’éviter aux parties un procès devant le juge du fond.

Plus rarement, la demande d’expertise judiciaire peut être demandée pendant le cours d’un procès au fond en tant que mesure d’instruction, généralement devant le Tribunal judiciaire. Cela arrive si les parties ne peuvent pas présenter de moyens de preuve suffisants, par exemple s’il n’y a eu qu’une expertise amiable bâclée et incomplète. Le juge a alors besoin de l’avis technique d’un expert judiciaire pour l’éclairer sur l’affaire et les défauts du véhicule.

L’expertise éclaire le juge, qui n’a pas à la base de compétences techniques, sur une question purement technique. L’avis de l’expert, qui ne lie pas le juge, l’aide à rendre son jugement. L’expert judiciaire est un technicien spécialisé dans un domaine particulier. Il est chargé de donner un avis au juge sur des points techniques dont dépend la solution d'un litige.

L'expert est inscrit sur une liste nationale des experts par spécialités. Chaque cour d'appel établit aussi sa propre liste d'experts judiciaires. En matière automobile, il existe bien entendu plus d’experts automobiles compétents pour examiner les véhicules modernes. Pour les véhicules de collection, ils sont plus rares. Il peut donc être judicieux pour l’avocat de suggérer au juge un ou plusieurs experts qui sont plus compétents en matière de véhicules anciens. Le juge peut désigner un expert inscrit sur une liste d'une Cour d'appel qui n'est pas dans son ressort, ce qui se comprend si le véhicule ancien est stocké dans une autre région par exemple où aura lieu l’expertise.

La demande de désignation d’un expert judiciaire se fait par voie d’assignation en référé devant le Juge des référés, le plus souvent au lieu où réside la partie adverse ou au lieu où se situe le véhicule à expertiser. Si elle est faite pendant un procès, la demande se fait par des conclusions de l’avocat de la partie qui demande l’expertise.

C’est à l’avocat de la partie qui demande l’expertise sur le fondement de l’article 145 du Code de procédure civile de prouver un « intérêt légitime » à une telle demande. Il faut notamment produire quelques premiers éléments sur les défauts constatés, par exemple un diagnostic d’un garage, un devis de remise en état et des photographies ou autres éléments de preuve. Il faut aussi démontrer au juge que l’expertise sera utile pour un futur procès au fond, par exemple pour obtenir la résolution de la vente ou pour engager la responsabilité d’un garagiste réparateur. L’avocat rédige avec soin dans l’assignation les termes de la mission de l’expert souhaitée et cela au cas par cas.

Généralement, dans sa mission, l’expert peut s’adjoindre tout sachant et autre technicien spécialisé, que l’on appelle un « sapiteur », pour l'assister dans l'accomplissement de sa mission. Le juge fixe un délai dans lequel l'expert devra déposer son rapport, généralement quatre mois en matière automobile, ce délai étant renouvelable.

Le juge décrit précisément dans son jugement, en tenant compte de la mission souhaitée par le demandeur, la mission de l’expert, les points à éclaircir et les questions auxquelles il doit répondre. Il indique les éléments ou les faits sur lesquels l'expert doit se prononcer, par exemple l'origine des défauts constatés et le coût de remise en état pour y remédier.

 

Le déroulement des opérations d’expertise judiciaire

Le déroulement de l’expertise judiciaire est encadré par des règles, notamment les articles 263 à 284-1 du Code de procédure civile. L’expert, dans le cadre de sa mission fixée par l’ordonnance de référé doit toujours veiller au respect du principe du contradictoire.

L'expert ne donne qu'un avis technique, il ne donne aucune appréciation juridique, car l’appréciation des responsabilités relève des seuls pouvoirs juridictionnels du juge. Le juge en pratique suit le plus souvent l’avis de l’expert, mais il peut s’en écarter, ce qui arrive lorsque le rapport d’expertise comporte des contradictions ou des incohérences. Pour un véhicule de collection de plus de cinquante ans, il est parfois difficile pour l’expert de déterminer si un vice caché comme un vice mécanique interne du moteur était présent ou non avant l’achat du véhicule. Il émet alors des hypothèses qui sont soumises à la discussion des parties.

Avant de débuter son expertise, l’expert vérifie que la consignation dont le montant est fixé par le juge et qui est généralement d’environ 1500 à 3000 euros selon les affaires, destinée à garantir le paiement de ses honoraires, a bien été versée à la Régie du Tribunal par la partie qui en a la charge, le plus souvent le demandeur à l’expertise. Tout au long de sa mission d'expertise, l'expert peut demander le paiement d'une consignation complémentaire, ce qui est fréquent en pratique.

Les parties sont invitées à participer aux opérations d'expertise, assistées de leur avocat et éventuellement de leur propre expert automobile. Si une partie convoquée refuse de participer et d’être représentée, l’expertise est réputée contradictoire à son égard.

L'expert doit convoquer les parties et leurs avocats à une réunion pour prendre connaissance du dossier et écouter l’exposé des circonstances de l’affaire et les observations des parties. Il réalise les constations techniques en leur présence selon le principe du contradictoire.

Le greffe transmet le dossier de procédure à l'expert qui peut également se faire communiquer par les avocats des parties tous les documents qu'il estime utiles. L'expert fixe un délai aux parties pour qu'elles lui communiquent leurs observations par écrit que l’on appelle des « dires ».

Le respect du contradictoire implique que chaque partie peut exposer son point de vue et discuter des preuves, faits et arguments liés à l'affaire concernée. Si une partie évoque des documents ou fait des observations à l'expert, celles-ci doivent être impérativement communiquées à l'ensemble des parties. De même, l'expert doit communiquer à toutes les parties ses notes et observations et son pré-rapport pour recueillir les observations des parties.

Pour l’expertise d’un véhicule automobile, en général une seule réunion est nécessaire, mais l’expert peut convoquer les parties à une seconde réunion en pratique, par exemple pour valider ou infirmer un point technique, effectuer un démontage complémentaire ou pour permettre à un professionnel d’évaluer le montant des réparations et d’établir un ou des devis de remise en état. L’expert judiciaire est souvent chargé dans sa mission de déterminer le coût de remise en état du véhicule.

La première réunion d’expertise se déroule ainsi en pratique : l’expert réunit les personnes présentes dans une salle de réunion, fait signer une feuille de présence et permet à chaque personne de se présenter que ce soit une partie, son avocat ou son expert automobile personnel.

Ensuite, l’expert rappelle les termes de sa mission telle que fixée par le juge. Il fait des observations sur le contexte de l’affaire, étant précisé qu’avant la réunion il a généralement reçu des pièces des avocats des parties, et permet aux parties et leurs conseils de s’exprimer sur l’affaire. Généralement, l’expert doit retracer l’historique du véhicule avec les entretiens et les réparations effectuées dans le passé. Pour un véhicule de collection ancien de plus de trente ans d’âge, son propriétaire est souvent incapable de fournir des factures sur les entretiens et réparations passées sur une longue période, surtout s’il a acquis récemment le véhicule et que le vendeur ne lui a rien fourni sur son historique. L’expert doit alors mener un examen minutieux du véhicule pour découvrir des traces de chocs, des traces de réparations anciennes ou des pièces détachées changées au fil du temps. Il peut récupérer certaines données auprès de l’Administration, mais cela n’est pas possible pour les véhicules récemment importés de l’étranger.

Pour un véhicule moderne, l’expert fait généralement effectuer un branchement avec une valise électronique ou un ordinateur pour se connecter au système du véhicule. Un rapport comportant la liste des défauts enregistrés dans le système du véhicule peut être édité. Il est alors soumis à un débat contradictoire.

Pour un véhicule ancien, l’expert ne peut pas brancher la valise électronique pour obtenir un rapport sur les codes défauts présents sur le véhicule. Il doit donc opérer à l’ancienne en se fondant sur des constatations sur le véhicule et ses éléments. C’est par exemple en faisant ouvrir le moteur par un technicien que l’expert détermine son état d’usure. Souvent, un prélèvement d’huile moteur est envoyé à un laboratoire pour analyse. La présence de limailles métalliques dans l’huile est le signe d’une usure avancée du moteur, parfois à cause d’une huile moteur usagée et non remplacée en temps voulu. Des outils permettent aussi de tester l’état des planchers. Parfois, en testant le châssis avec un tournevis, il passe à travers, ce qui est le signe d’une corrosion avancée !

Après cette réunion, l’expert et les personnes présentes examinent le véhicule au sol et aussi systématiquement sur un pont élévateur. Le dessous d’un véhicule révèle l’état du châssis, des bas de caisse, des trains roulants, de la suspension et parfois des traces d’accidents anciens, des fuites d’huile ou des réparations anciennes plus ou moins bien faites. C’est le reflet d’un plus ou moins long usage sur la route. L’expert recherche aussi la plaque du constructeur, les frappes à froid du numéro de châssis et les numéros présents sur le véhicule. Il vérifie la conformité des éléments du véhicule, par exemple qu’il est doté de son moteur d’origine. Dans une affaire, l’expert examinait une Jaguar MK II 3,8L et fut étonné de constater qu’elle était équipée d’un moteur 4,2L de Jaguar Type E, une non-conformité évidente et une modification notable permettant d’annuler la vente. A l’aide d’un technicien, il faut parfois procéder à des démontages, notamment du moteur pour évaluer les causes d’une casse moteur ou de son usure prononcée.

A la fin de la réunion, l’expert fait un compte rendu de ses constatations et fournit un premier avis aux personnes présentes qui peuvent s’exprimer. Un procès-verbal peut en être dressé.

Par la suite, l’expert adresse généralement une note technique d’étape retraçant ce qui a été constaté lors de la réunion d’expertise. Les avocats des parties peuvent alors faire des observations écrites par des « dires » en mettant en avant leurs arguments et leurs critiques auxquels l’expert doit répondre et qui seront annexés au rapport final.

Lorsque l'expert a presque achevé sa mission, il établit un pré-rapport pour permettre aux parties d'adresser des observations écrites qui seront annexées au rapport d’expertise, des « dires ». Les parties doivent respecter le délai fixé par l'expert pour faire leurs observations sur ce pré-rapport.

Après avoir tenu compte de ces dires, il établit un rapport d’expertise judiciaire qui est déposé au Tribunal avec ses annexes à l’attention du Juge. Ce rapport est communiqué à toutes les parties. Il marque la fin des opérations d’expertise judiciaire.

Si les parties ne parviennent pas à conclure une transaction, alors ce rapport d’expertise judiciaire sera la pièce centrale du futur procès au fond.

 

Recours possibles et difficultés diverses

Au stade du référé, il arrive qu’une partie souhaite contester l’ordonnance de référé qui a désigné l’expert et définit sa mission. C’est parfois le cas lorsqu’une partie conteste les termes de la mission. Un appel est possible devant la Cour d’appel.

Dans le cas d’une expertise demandée au cours d’un procès au fond et qui serait refusée, il faut généralement attendre le jugement pour faire appel est contester celui-ci.

Il arrive aussi en cours d’expertise judiciaire qu’une partie conteste le champ de la mission et demande une modification ou une extension de la mission de l’expert ou bien soulève des incidents comme la demande de considérer une pièce produite irrecevable. Elle formule cela auprès du juge du contrôle des expertise, qui rend alors une ordonnance. Cela peut permettre à l’expert d’étendre ses investigations par exemple à l’ensemble d’un véhicule où de la corrosion perforante est découverte alors que sa mission était limitée au défaut évident du train avant. Le juge peut demander à l'expert d'exposer verbalement son avis à l'audience, ce qui arrive en pratique lorsqu’il s’agit de modifier le champ de sa mission.

En cours d’expertise, si l'une des parties rencontre des difficultés, par exemple si le délai est très long ou en cas d’absence de communication de pièces par l’autre partie, le juge du contrôle des expertise peut en être informé. Une difficulté est apparue dans une affaire dans laquelle le garage assigné était défaillant et était resté taisant. Le juge a ordonné une expertise et lors de la réunion d’expertise fixée dans les locaux de ce garage, l’expert, le demandeur et son avocat ont constaté avec surprise que le garage avait cessé son activité, que les locaux avaient été totalement vidés et que le véhicule laissé pour réparations qui devait être expertisé avait disparu. Des peintres étaient en train de repeindre les lieux pour une autre entreprise. Le juge a été avisé de cette difficulté assez inhabituelle.

Une fois que l’expert judiciaire a été désigné, le juge des référés lui donne habituellement un délai de 4 mois pour mener son expertise et déposer son rapport. Un rapport peut donc être obtenu dans les affaires simples au bout de quelques mois. Il permet alors aux parties de tenter de transiger. A défaut, il faut saisir le Tribunal judiciaire sur le fond de l’affaire. Celui-ci peut mettre environ un an pour juger l’affaire au fond, sauf complications. Le jugement est généralement exécutoire de plein droit, ce qui signifie qu’il doit être exécuté même si la partie perdante fait appel. En cas d’appel, la procédure est prolongée parfois de deux ans car les Cours d’appel sont fort encombrées.

Dans les cas compliqués, la procédure peut s’allonger, notamment en cas de contestation de l’ordonnance de référé par un appel qui sera alors jugé par la Cour d’appel. De même, pendant l’expertise, en cas de contestation devant le juge du contrôle des expertises, par exemple pour étendre la mission de l’expert, le juge doit alors statuer par ordonnance. Un recours devant la Cour d’appel est possible, ce qui rallonge encore la durée totale de la procédure, qui peut donc en pratique durée plusieurs années dans les affaires complexes. Ces considérations montrent qu’il est donc souhaitable de conclure une transaction après le dépôt du rapport d’expertise afin de clôturer rapidement le litige et d’éviter un procès au fond, si les parties ont en la volonté, ce qui n’est pas toujours le cas.

Avec le dépôt du rapport, l'expert joint à l’attention du Juge sa demande de rémunération qu'il doit communiquer également à toutes les parties. Les parties ont 15 jours pour faire leurs observations écrites à ce sujet. Des contestations peuvent être soulevées devant le Juge en cas de désaccord sur la rémunération de l’expert. Passé ce délai, le Juge fixe la rémunération de l'expert par une ordonnance en fonction des actes accomplis, du respect des délais et du travail fourni.

Après réception du rapport d’expertise, une partie peut demander une contre-expertise si elle conteste tout ou partie du rapport, mais il faudra convaincre le Juge que cela est nécessaire.

Après le dépôt du rapport d’expertise judiciaire et à défaut de transaction entre les parties, la partie qui s’estime lésée sera contrainte d’assigner au fond la partie adverse afin de faire valoir ses droits et que le Tribunal saisi tranche le litige entre les parties.

 

Me Grégoire Marchac

Avocat au Barreau de Paris


Quels recours pour contester les avis de contravention ?

La sécurité routière reste un enjeu national et la traque aux contrevenants continue, par des appareils automatisés, des contrôles mobiles ou par la vidéoverbalisation qui se développe surtout en zones urbaines. Quels sont donc les recours pour les conducteurs ?

Des p.v. relevés par des appareils automatisés

En pratique, le plus grand nombre de procès-verbaux de contravention en matière routière est issu des contrôles automatisés avec 26,1 millions de p.v. dressés en 2017. Pour ces infractions, les avis de contravention sont adressés au propriétaire du véhicule. Les locataires les reçoivent aussi systématiquement à la suite de la désignation par les loueurs de véhicules.

Dans le cadre du système de l’amende forfaitaire, pour les contraventions des quatre premières classes, lorsque le propriétaire reçoit l’avis de contravention et qu’il a un doute, il est en droit de demander au centre de contrôle automatisé des infractions situé à Rennes l’envoi des photographies relatives à l’avis en cause, par lettre accompagnée d’une photocopie d’une pièce d’identité, du certificat d’immatriculation du véhicule et de l’avis reçu. Cette démarche n’étant pas suspensive : elle n’interrompt donc pas le délai de 45 jours à compter de la date d’envoi de l’avis pour contester l’infraction.

S’il existe un motif sérieux pour contester l’infraction ou lorsque l’examen des photographies prises par l’appareil automatisé ne permet pas d’identifier clairement et sans équivoque le conducteur au moment des faits, le propriétaire ou le locataire qui reçoit l’avis a la possibilité de contester être l’auteur de l’infraction par une « requête en exonération » en envoyant une lettre recommandée avec A.R., dans les 45 jours de la date d’émission de l’avis, au centre de contrôle automatisé avec le formulaire de requête en exonération daté et signé en joignant l’exemplaire original de l’avis, en application de l’article 529-10 du Code de procédure pénale.

Au stade de l’amende forfaitaire majorée (AFM), la contestation se nomme « réclamation » et doit être adressée en principe dans le délai de trois mois à compter de l’émission de l’avis d’amende forfaitaire majorée selon l’article 530 du Code de procédure pénale. Ces contestations doivent être argumentées en fait et en droit en rappelant les textes applicables et la jurisprudence afin d’avoir des chances sérieuses de succès.

Rappelons qu’en matière de contravention, une personne physique qui est titulaire du certificat d’immatriculation d’un véhicule n’a aucune obligation de désigner la personne qui était le conducteur du véhicule au moment des faits.

En revanche, pour les personnes morales propriétaires ou locataires d’un véhicule, telles que les sociétés commerciales ou les associations, une obligation spécifique de désignation de l’auteur des faits par le représentant légal de la personne morale a été introduite en 2017 et est visée à l’article L. 121-6 du Code de la route.

Dans sa requête en exonération, le propriétaire ou le locataire du véhicule est en droit de contester être personnellement l’auteur de l’infraction. En effet, il revient au ministère public, qui a la charge de la preuve, de prouver qui était le conducteur du véhicule pour engager sa responsabilité pénale personnelle.

En contestant une infraction relevée par un appareil de contrôle automatisé, le propriétaire doit verser une consignation du montant de l’amende forfaitaire, sorte de montant de garantie qui sera remboursé en cas de relaxe, ou viendra en déduction d’une éventuelle amende civile au titre de la responsabilité pécuniaire du titulaire du certificat d’immatriculation ou du locataire.

Lorsque le ministère public ne peut pas prouver que le titulaire du certificat d’immatriculation ou le locataire était effectivement le conducteur du véhicule au moment des faits, notamment lorsque les photographies relatives à l’infraction sont trop sombres, floues ou prises par l’arrière du véhicule, ne permettant ainsi pas d’identifier clairement et sans équivoque le conducteur, les chances de relaxe au plan pénal sont élevées, conformément à la jurisprudence constante.

Une telle relaxe pénale a pour effet d’écarter tout retrait de points et toute inscription de l’infraction au Casier judiciaire. Toutefois, même en cas de relaxe pénale, le juge a la possibilité de prononcer à l’encontre du propriétaire ou du locataire du véhicule une amende civile au titre de la responsabilité pécuniaire visée à l’article L. 121-3 du Code de la route qui n’entraîne aucun retrait de points ni inscription de l’infraction au Casier judiciaire.

Toutefois, si le propriétaire du véhicule peut établir, par tous moyens de preuve, qu’il était ailleurs au moment des faits, par exemple en produisant des billets d’avions ou de train nominatifs, la relaxe totale s’impose avec remboursement de la consignation versée, sans responsabilité pécuniaire.

Les p.v. relevés par vidéoverbalisation peuvent être contestés

En ville, la vidéo-verbalisation est devenue un instrument efficace pour dresser des procès-verbaux à distance. Dans la capitale, près de 1.200 caméras vidéo contrôlent les faits et gestes des usagers. Un agent situé dans une salle de contrôle surveille les écrans projetant les images des caméras vidéo et dresse des p.v. sur un écran dédié. Les informations sont ensuite adressées au centre de contrôle de Rennes qui émet les avis adressés au titulaire du certificat d’immatriculation du véhicule concerné dont le nom et les coordonnées figurent sur le système des immatriculations (SIV).

Un décret n° 2018-795 du 17 septembre 2018, modifiant notamment les articles R. 130-11 et R. 121-6 du Code de la route, a allongé la liste des contraventions pouvant faire l’objet d’un p.v. établi par un agent à distance et pouvant par ailleurs engager la responsabilité pécuniaire du propriétaire du véhicule ou du locataire. Nombre de p.v. ont déjà été émis pour circulation dans les voies de bus ou sur les pistes cyclables, pour non-respect des feux rouge, refus de priorité à un piéton ou circulation en sens interdit.

Pour ce type de contraventions, le propriétaire ou locataire du véhicule est parfois surpris de recevoir à son domicile un avis qui indique que le contrevenant a fait l’objet d’un « contrôle », sans mentionner expressément que le contrôle résulte de la vidéoverbalisation.

En l’absence d’interception et donc d’identification formelle du conducteur, le propriétaire ou le locataire du véhicule qui reçoit à son domicile un avis de contravention généré par la vidéo-verbalisation est en droit de contester l’infraction par une requête en exonération recevable dans les 45 jours de la date d’émission de l’avis. Il peut contester être personnellement l’auteur des faits et aussi tous autres moyens utiles. Dans ce cas de figure, le propriétaire ou le locataire qui conteste la contravention n’a pas à verser de consignation préalable.

Sauf à prouver par tous moyens qu’il n’est pas l’auteur des faits, il s’expose généralement à une amende civile au titre de sa responsabilité pécuniaire sans retrait de points, comme c’est déjà le cas pour les excès de vitesse ou pour le non-respect des feux rouges fixes relevés par des appareils automatisés.

Dans le cas d’une contravention relevée avec interception du conducteur pour divers types d’infractions, la requête en exonération doit aussi être déposée dans les 45 jours de la date d’émission de l’avis et devra indiquer, au cas par cas, en quoi le procès-verbal était le cas échéant irrégulier ou l’infraction non constituée, par exemple, un p.v. de contravention pour excès de vitesse qui ne mentionne pas le lieu précis de l’infraction est dénué de force probante du fait de cette imprécision.

Par Me Grégoire Marchac
Avocat à la Cour de Paris
Administrateur de l’Association des Avocats de l’Automobile.


Contestation de l'annulation du permis de conduire

J’ai reçu un document m’indiquant que je n’avais plus de point sur mon permis de conduire et que je devais le restituer aux Services de la Préfecture. Dans la mesure où je conteste cette décision, j’ai saisi le Tribunal Administratif pour la faire annuler. Ai-je le droit de conduire pendant la procédure ?

la réponse de Fabien KOVAC, Avocat au Barreau de Dijon

Contrairement à beaucoup d’idées reçues, le fait de saisir le Tribunal Administratif pour contester la validité de la décision du Ministre qui constate le solde nul du nombre de points de votre permis de conduire n’est pas suspensif, ce qui implique que vous ne pouvez pas conduire pendant la procédure devant le Tribunal Administratif.

Dans le cas contraire, vous vous rendriez coupable d’une infraction passible de poursuites devant le Tribunal Correctionnel.

Il existe en revanche une possibilité qui consiste à saisir le Tribunal Administratif d’une part de l’action que vous avez engagée, c'est-à-dire d’une action pour obtenir l’annulation de la décision du Ministre et d’autre part, de le saisir d’une seconde action, en référé cette fois-ci, pour demander au Président du Tribunal Administratif de suspendre l’exécution de la décision ministérielle.

Si le Président fait droit à cette demande, vous aurez ainsi la possibilité de conduire pendant la durée de la procédure. A défaut, il conviendra d’attendre la décision au fond.